ESPACE D’INTERPELLATION DEMOCRATIQUE 24EME SESSION, EDITION 2019 : CONTRIBUTION D’AMNESTY INTERNATIONAL MALI

Bamako 10 décembre 2018

Espace d’interpellation Démocratique

Edition 2019

Madame / Monsieur le président du Jury d’honneur,

Mesdames et Messieurs les membres du Jury d’honneur,

Monsieur le Premier ministre, chef du gouvernement,

Monsieur le Médiateur de la République,

Mesdames et Messieurs les membres du Gouvernement

Mesdames et Messieurs honorables invités en vos rangs, grades et qualités ;

Amnesty International remercie une fois de plus les autorités étatiques pour lui avoir donné l’occasion de s’exprimer sur la situation des droits de l’homme au Mali.

Notre intervention, cette année, va porter sur certains sujets de préoccupations pour les populations maliennes :

  • La problématique de la réparation des erreurs judiciaires au Mali ;
  • La problématique du décret d’application de la loi portant protection des défenseurs des droits de l’homme adoptée en janvier 2018 ;
  • Les violences basées sur le genre ;
  • Et enfin, le problème de l’esclavage au Mali.

L’impact de la crise sécuritaire sur les droits de l’enfant au Mali.

  1. Nous remercions sincèrement le Président de la République, pour l’adoption de la loi N° 2018-003/Du 12 JAN.2018 Portant protection des défenseurs des droits de l’homme . Mais cette loi souffre de mesure d’accompagnement, faute de décret d’application. Malgré les démarches entreprises par les organisations de défense des droits de l’homme qui ont abouti à l’élaboration d’un projet de décret d’application, et malgré un travail de plaidoyer intense à l’endroit du Ministère de la Justice, des Droits de l’homme, le décret tarde à venir. Nous insistons sur l’impérieuse nécessité de l’adoption de ce décret compte tenu du climat social dans lequel nous travaillons.
  2. Mesdames et Messieurs, honorables invités, la consommation de stupéfiants est en train de faire des ravages dans notre société à tous les niveaux et spécifiquement dans nos ménages. Les assassinats de plus en plus fréquents des épouses par leurs conjoints constituent l’une des conséquences de ce fléau. A ce niveau, nous avons constaté une discrimination dans le jugement des meurtres des époux par leurs femmes et celui des femmes par leurs époux. Les juges ont tendance à être beaucoup plus cléments envers les hommes que les femmes. Nous dénonçons cette distribution sélective de la justice au détriment des femmes, qui constitue une pratique contraire aux principes du droit. En retour, nous réclamons une loi contre les VBG au Mali.
  3. Un autre phénomène pas des moindres est le mariage d’enfant qui compromet l’avenir de nos enfants avec des conséquences irréversibles dans la société. Bien que nous venions de commémorer le trentième anniversaire de la Convention relative aux droits de l’enfant, les enfants sont actuellement la couche la plus touchée par la crise sécuritaire, qui en fait des orphelins, des déplacés et des déscolarisés avec la fermeture des écoles dans les régions du nord, du centre et même du sud, affectées par la crise. Tout ceci fait apparaitre la nécessité d’une loi contre les VBG. Nous nous réjouissons du fait que les membres du gouvernement présents lors du sommet de Nairobi se sont engagés en faveur de l’adoption d’une loi contre les VBG. Nous souhaitons ardemment voir cet engagement se concrétiser.

Mesdames et messieurs, nous nous réjouissons de constater que l’indépendance de la justice malienne commence enfin à se concrétiser ; nous félicitons le chef de l’Etat pour son engagement personnel dans ce sens lors de la rentrée judiciaire 2019 et souhaitons qu’il se poursuive pour le bonheur des populations du Mali, car nul n’ignore que la mauvaise distribution de la justice entraine l’esprit de revanche et du coup des conflits.

Nous avons d’autre part le regret de constater que les personnes injustement arrêtées et condamnées pour des faits d’erreurs des magistrats, ne bénéficient d’aucune mesure de réparation après leur libération et que les magistrats responsables de ces erreurs ne sont nullement inquiétés. Face à cette situation, nous invitons les autorités étatiques à prévoir des mécanismes de réparation de telles erreurs qui constituent une violation grave des droits des justiciable.

Une autre situation de nos jours devient de plus en plus inquiétant, il s’agit du problème de l’esclavage, qui se pose avec acuité et interpelle les responsables étatiques à tous les niveaux. Les Ministres en charge de l’Administration territoriale, celui en charge de la Justice et celui en charge de la Sécurité sont fortement interpellés pour faire face à ce problème qui a fait des victimes et continue d’en faire. Les populations de la région de Kayes fortement touchées par le problème sont en quête de justice et de réparation pour les dommages physiques, matériels et moraux dont elles ont été victimes du fait de cette pratique. Nous vous incitons à vous impliquer d’avantages pour faire comprendre à ceux qui se disent maîtres d’esclaves, que tous les Maliens naissent libres et égaux en droit. Ces- soi-disant maîtres d’esclaves doivent comprendre que de tels actes sont assimilables à la discrimination raciale inconciliable avec le respect des droits humains.

Je voudrais, Madame Monsieur le Président du Jury d’honneur, vous souhaiter une excellente session de l’Espace d’Interpellation Démocratique 2019, en espérant que nos préoccupations et inquiétudes seront favorablement prises en charge par les autorités concernées pour le bien des populations en général et des Défenseurs des droits humains en particulier.

Je vous remercie